Une protection sociale solidaire est possible (Tribune)

Une protection sociale solidaire est possible (Tribune)

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(Juillet 2018)

Accusée de tous les maux par certains, notre protection sociale serait dépensière, inefficace et inadaptée. Pourtant, elle sauve chaque jour des vies. En soixante-dix ans, la protection sociale a fait ses preuves pour effacer « la peur du lendemain » causée par la maladie, la vieillesse et parfois la pauvreté. Faut-il alors, pour mieux la défendre, jouer l'immobilisme et fermer les yeux sur ses limites ?

 

Non. La protection sociale doit relever de nouveaux défis : un chômage endémique, un état de santé qui se dégrade pour une partie de la population, une hémorragie du système hospitalier, une pauvreté trop élevée, une concurrence accrue entre les précaires, des phénomènes d'enclavement et de ségrégation..

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Cela doit changer ! Mais dans quel sens ? Le Président de la République a prononcé un discours à la Mutualité le 13 juin qui présente une ''transformation'' en citant la prévention, la justice sociale, la dignité, l'universalité, l'émancipation, l'accompagnement, la responsabilisation...

 

Mais derrière les mots imprécis se cachent des interrogations majeures : la prévention s'additionne-t-elle ou remplace-t-elle le soin ? L'universalité est-elle de haut niveau ou résiduelle ? La responsabilisation des pauvres suggère-t-elle leur irresponsabilité actuelle, alors qu'ils se battent et se débattent contre un système inégalitaire ? Quelle responsabilité des entreprises qui participent au système à travers la cotisation employeur ? Quelle responsabilité des plus riches d'entre nous ?

 

Dans une société où la justice sociale est liée au travail rémunéré, quelle place fait-on à ceux qui en sont marginalisés ? En brandissant la menace insidieuse de la ''dépense publique'', s'agit-il d'abandonner le principe fondateur de la protection sociale « de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins » ?

 

Nous réfléchissons depuis plusieurs années avec des personnes de toute condition – y compris des personnes subissant la pauvreté - à l'avenir de notre système de protection sociale. De ce travail, nous tirons une conviction : il doit être refondé pour traduire notre interdépendance et préserver la paix. Celle-ci est mise en cause par la montée des inégalités, par ce sentiment diffus et venimeux que nous ne vivons plus dans un monde commun, que les règles du jeu sont pipées entre ceux qui ont une place et ceux qui n'en n'ont pas. Pour cela, notre système doit lutter contre la pauvreté, l’exclusion et les inégalités qui minent notre cohésion sociale.

 

Oui à des droits concrets et accessibles attachés à chaque personne contribuant au bien commun ! Oui à un accompagnement centré sur le développement du pouvoir d'agir individuel et collectif des personnes concernées ! Oui à une universalité de haut niveau ! Oui à une responsabilité collective et en premier lieu celle d'un Etat qui renforce les solidarités !

 

Mais oui aussi à une démocratie sociale élargie à tous les citoyens ! Oui à une protection sociale qui prenne en compte les enjeux écologiques pour être réellement préventive ! Oui enfin et surtout à un partage des richesses qui est la condition sine qua non pour que ce ne soient pas les règles du marché qui s'imposent à tous les âges de notre vie, de la crèche à la maison de retraite !

 

Un autre scénario est possible : celui d'une protection sociale solidaire qui se donne les moyens de protéger celles et ceux qui font face aux « morsures de la vie », qui soutient leur pouvoir d'agir dans chaque situation et qui réaffirme le caractère inaliénable et sacré des droits fondamentaux. Nous sommes témoins de l’extraordinaire générosité des personnes en galère. Leur solidarité doit être reconnue et valorisée

 

Engagés pour une protection sociale solidaire, nous proposons de nous assembler en signant cette tribune sur www.protectionsocialesolidaire.org, en mettant en commun nos propositions et en travaillant ensemble pour préserver et réinventer cet élément fondateur de notre contrat social républicain.

 

Premiers signataires

Véronique Fayet, Présidente Secours Catholique - Caritas France
Claudie Miller, Présidente Fédération Nationale des Centres Sociaux
Pascale Caron, Présidente Réseau des Accorderies de France
Emmanuel Bodinier, Coordinateur d'AequitaZ
Matthieu Angotti, Co-Président Groupe de concertation Stratégie Pauvreté
Christine Laconde, Co-Présidente Groupe de concertation Stratégie Pauvreté
Antoine Dulin, , Co-Président Groupe de concertation Stratégie Pauvreté
François Soulage, Président Alerte
Laurent Berger, Secrétaire général CFDT
Louis Gallois, Président Fédération Acteurs Solidarité
Laurent Desmard, Président Fondation Abbé Pierre
Eric Pliez, Président Samu Social de Paris
Corps du bloc "Nos propositions"