1956-1983. La création d’allocations ciblées
1956-1983. La création d’allocations ciblées
Après 1945, la condition salariale se consolide. La croissance économique est importante et on se fonde sur elle pour construire le progrès social. La conscience des enjeux écologiques est inexistante. Le chômage au plus bas. La société est structurée par une opposition entre patrons et syndicats qui gèrent ensemble des assurances sociales pour des emplois stables. La Sécurité Sociale est créée pour faire face à des risques sociaux ciblés. Les droits sont ouverts pour les salariés puis élargi à d’autres catégories de travailleurs.
Dans la continuité de l’assistance sociale de la IIIe République, de hauts fonctionnaires, des chercheurs et des acteurs associatifs pointent l’oubli et la marginalisation de certains publics laissés aux marges de la croissance économique1. Des allocations ciblées sont créées par l’Etat. Sans éradiquer la pauvreté, elles évitent l’indigence à des publics considérés comme « inactifs ».
Ces minima sociaux 2 allouaient à peu près 60% du montant du salaire minimum et ciblaient particulièrement :
- Les personnes retraitées sans ou avec de faible pensions qui est la population la plus nombreuse en situation de pauvreté
- 1956. Allocation Supplémentaire Vieillesse (AVS) garantissant un « minimum vieillesse » en remplaçant l’Allocation aux Vieux Travailleurs Salariés (AVTS) créée en 1941. Elle visait à compléter le niveau des pensions pour ceux et celles qui n’ont pas pu cotiser assez pour atteindre un montant donné. Elle était financée par la vignette automobile. Elle deviendra l’Allocation Spécifique pour les Personnes Agées (ASPA) en 2007.
- Les personnes fragilisées par leur état de santé
- 1957. Allocation Supplémentaire d’Invalidité (ASI) garantissant un « minimum invalidité » au titre d’une incapacité permanente
- 1975. Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) pour les personnes qui ne peuvent pas travailler du fait d’un handicap. Il est créé hors des accidents du travail alors qu’il aurait pu être intégré dans une branche « invalidité ». Son montant est aligné sur celui du minimum vieillesse. Cette allocation est créée dans le cadre de lois plus larges qui instaurent également des structures d’insertion professionnelle (centres d’aide par le travail, ateliers protégés, obligation d’embauche dans les entreprises ordinaires). Les deux aspects du revenu et de l’activité sont déconnectés.
- Les personnes fragilisées par une rupture familiale et ne pouvant s’appuyer sur les revenus du conjoint, principalement des femmes. Ces deux allocations étaient conçues avec une durée limitée mais sans obligation d’insertion professionnelle
- 1976. Allocation de Parent Isolé (API) pour les personnes ayant au moins un enfant né ou à naître. Elle est versée jusqu’aux 3 ans de l’enfant3 pour maintenir les mères à proximité du travail alors que son équivalent britannique est versé jusqu’à 16 ans. Elle visait notamment les mères célibataires. Elle est intégrée sans être fusionnée dans le Revenu de Solidarité Active (RSA majoré) en 2008.
- 1980. Allocation Veuvage (AV) pour les personnes d’au moins 55 ans, survivant à un assuré social décédé et ne pouvant prétendre à une pension de réversion. Elle était versée pendant 3 ans à compter du mois du décès.
Parallèlement, des aides personnelles au logement, attribuées à l’ensemble des familles modestes ont permis de limiter la précarité du logement. Elles sont cumulables avec les minima sociaux. L’Allocation de Logement Familial (ALF) créée en 1948 pour les locataires ou les accédants à la propriété ayant des enfants ou des personnes à charge. L’Allocation de Logement Social (ALS) pour les personnes âgées, infirmes ou les travailleurs de moins de 25 ans créée en 1972. Elle fût élargie au début des années 1980 aux allocataires de minima sociaux (ASS, AI) L’Aide Personnalisée au Logement (APL) créée en 1978 pour l’ensemble des ménages modestes locataires ou propriétaires sous condition de ressources.
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1 Viguier Frédéric, La cause des pauvres : mobilisations humanitaires et transformations de l’État social en France (1945-2010), 2010, http://www.theses.fr/2010EHES0034
2 Cette partie s’appuie notamment sur Nauze-Fichet Emmanuelle, « Historique du système des minima sociaux », dans Hazouard, S., Lasserre, R. et Uterwedde, H. (éds.), L’aide au retour à l’emploi : Politiques françaises, allemandes et internationales, Cergy-Pontoise, IFAEE, 13 décembre 2017, pp. 73‑92 (Travaux et documents du CIRAC)
3 Ou pendant un an si l’enfant a plus de 3 ans.