Une diversité de formes de reconnaissance
Une diversité de formes de reconnaissance
(pour plus de détails, voir le rapport "Un boulot de dingue")
Le revenu minimum garanti, sans contrepartie
Un enjeu majeur, une forme de condition minimale et sine qua non, est la garantie d’un revenu décent, un plancher social qui permette à chacun de gagner en stabilité, et donc de se projeter plus sereinement, entre autres dans des activités du care.
Un revenu garanti qui permette à chacune et à chacun de vivre en dehors du stress du lendemain, de gagner de
l’estime de soi et de trouver une meilleure place dans la société, de sortir de la survie, qui n’oblige pas à consacrer une bonne part de son temps à se débattre pour manger, accéder aux soins, etc.
Voir "Nos propositions : pour un revenu minimum garanti"
La reconnaissance à travers des trimestres de retraite
Certains font le constat d’une vie entière d’aidant ou de bénévole, mais « privée d’emploi», qui aboutit à de fortes inquiétudes à l’arrivée de la retraite. Finalement, cette "carrière" bénévole est injustement reconnue quand on arrive à l’âge de diminuer son activité car elle n’ouvre pas de droits à des trimestres pour la retraite. Pouvoir ouvrir de tels droits serait une forme de reconnaissance essentielle.
La prise en charge des frais et des risques
Pour faire du bénévolat, aider son voisin à tailler sa haie, lui acheter une boîte de paracétamol en urgence, accompagner une personne en voiture, il y a des frais engagés qui sont inhérents à l’activité. Ces "faux frais" que l’on pourrait imaginer comme minimes sont en réalité de vrais frais qui finissent par peser sur le budget.
Nous avons identifié des pistes de soutien matériel, assurantiel et financier :
- le remboursement des dépenses nécessaires à la réalisation de l’activité : garde d’enfants, transports notamment en milieu rural, par exemple ;
- les assurances en cas d’accident : une assurance professionnelle n’est pas la même qu’une assurance domestique et responsabilité civile, en cas d’accident de voiture au travail ou "en bénévolat", ou bien si on tombe d’une échelle chez une personne que l’on aide. La différence est dans la prise en charge du long terme, quand des complications de santé surviennent quelques années après, en lien avec l’accident.
- des prestations pour alléger des dépenses : petits achats, sorties culturelles soutenues autant pour l’aidé que pour l’aidant, aide financière pour un parrainage…
La reconnaissance symbolique
Cette reconnaissance touche à la visibilité sociale de l'action réalisée, elle permettrait de sortir de l’invisibilité et d’un regard jugeant ou négatif. Elle concrétise une vision de la société où les actions de solidarité et de soin aux autres sont considérées comme importantes, essentielles, et valorisées pour cela.
Cela concerne cette entraide et solidarité de proximité, dans des domaines très variés. On peut donner l'exemple de l'importance des aidants familiaux, essentiels et indispensables dans la prise en charge des personnes dépendantes à l’échelle du pays, et qui prennent en charge tout ce que l’auxiliaire de vie ne peut pas ou n’a pas le temps de faire, dans son temps contraint et minuté. Un autre enjeu est celui de donner à voir l’ampleur et la diversité des tâches assumées, par exemple par les bénévoles d’une même commune.
Néanmoins, nous avons vu qu’il fallait être attentif à déjouer le "fait du prince", c’est-à-dire l’arbitraire d’une décision de reconnaissance unilatérale individualisant les mérites. Cela passe notamment par des processus collectifs de décision pour savoir ce que l’on reconnait, qui on reconnait, et de quelle manière.
La rétribution financière, notamment pour expertise
L’expertise a un statut particulier qui la place dans le champ de la rémunération. On paie un expert pour qu’il délivre son expertise sur le sujet. Le champ de la participation citoyenne dans le secteur de la lutte contre la pauvreté appelle à une meilleure reconnaissance de cette expertise 1 .
Il est cependant nécessaire de prendre garde à ce que des rétributions financières ne soient pas seulement à la charge des associations, ce qui aurait pour conséquence la mise à l’écart des petites associations qui ne pourraient y faire face.
Par ailleurs, cette rétribution doit être incluse dans le champ de la "neutralisation des ressources" pour le calcul des minima sociaux, afin qu'elle ne vienne pas diminuer les aides reçues par les personnes expertes et en situation de précarité
La valorisation des compétences et le droit à la formation.
C’est un point d’appui essentiel pour que les personnes puissent se sentir reconnues dans les compétences qu’elles ont acquises durant leur expérience d’engagement.
Nous avons également mentionné la reconnaissance par le droit à accéder à des formations, à partir de son expérience hors emploi pour pouvoir progresser, évoluer dans ces activités, mettre à jour ses connaissances.
Nous avons enfin identifié l’importance de prestations de ressourcement, de supervision, de codéveloppement, d’échanges d’expériences. Il s’agit, par ces formes de reconnaissance, de prendre la mesure des responsabilités engagées par les personnes dans ces activités et de l’importance de regarder la qualité de ce qui y est vécu et mis en œuvre, en particulier dans les activités de l’humain, de l’entraide et de la solidarité de proximité. Cela peut être lourd pour la personne. Quand on est responsable dans une association, on est parfois isolé, on se débrouille comme on peut, alors qu’on a aussi besoin d’être soutenu dans sa mission, pris en charge à son tour, parfois.
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1 Dans son rapport de mai 2023, le Conseil national de lutte contre les exclusions tire les leçons du "choc de participation". Il met notamment en avant le fait que "la question de l’indemnisation des bénévoles dans les travaux de participation citoyenne est un sujet fréquemment abordé dans les instances en charge de démocratie participative. Il semble d’autant plus crucial au CNLE que les personnes concernées sont de facto des personnes à qui profiterait le plus une forme de rémunération". Le rapport précise également que 70,8 % des répondants à l’enquête menée sont favorables à mettre en place des indemnisations des personnes pour des sollicitations externes au CNLE.